
Être enceinte, c’est déjà une aventure en soi, mais alors, être enceinte, se fiancer, déménager en Italie, commencer un nouveau boulot dans une nouvelle langue, c’était un sacré challenge ! Je n’avais pas du tout anticipé le déroulement de ma grossesse, encore moins de la vivre à l’étranger, fraîchement débarquée. Ça été une période incroyablement enrichissante d’un point de vue personnel et pour notre couple. Je vous raconte comment on a surmonté ces épreuves et décidé de vivre notre meilleure vie en Italie.
Le fameux cap des 30 ans
Pour reprendre l’histoire de cette grossesse pas comme les autres au début, revenons au mois de juin 2018. Cela fait un mois que j’ai 29 ans et qui dit 29 ans, dit 30 ans l’année suivante. Comme beaucoup d’entre nous, je m’étais toujours imaginée à 30 ans avec un certain nombre de réalisations à mon actif. Pour certains c’est le CDI, pour d’autres être propriétaire et pour d’autres encore, vivre à l’étranger. Pour moi, ce n’était pas un seul, mais deux objectifs: être mariée et avoir eu mon premier enfant. J’étais si déterminée qu’après à peine trois semaines de fréquentation je l’avais déjà annoncé à mon (futur) mari Lucas. Il n’avait à l’époque que 23 ans. Il avait alors accueilli la nouvelle avec le flegme qui le caractérise à chaque fois que j’ai une nouvelle lubie. C’est ce qui a permis à notre couple de fonctionner jusqu’ici. Merci la vie.
Nous voici donc en juin 2018 et ma détermination n’a pas faibli. Je compte les mois qui me séparent de mes 30 ans et il n’en reste plus beaucoup. La tradition veut que ce soit l’homme du couple qui fasse la demande en mariage. Ne me voyant pas faire la demande moi-même je n’avais qu’à prendre mon mal en patience. Concernant l’objectif “mariage”, je n’avais aucune marge de manoeuvre.
« Ce n’est pas le bon moment. »
Lucas
Arrive donc la discussion inévitable avec Lucas concernant mon désir de maternité. Il n’a aucun problème sur l’idée de fonder une famille mais a quelques arguments contre le fait de se lancer immédiatement. Le plus difficile à contrer étant : “ce n’est pas le bon moment”. Je réussis pourtant à lui faire comprendre qu’en réalité, ce n’est jamais le bon moment pour un chamboulement aussi important dans la vie. De toute façon ce n’est pas comme si on claquait des doigts et on était enceinte. C’est un processus naturel que l’on ne maîtrise pas. Ma soeur qui est en médecine m’a assuré que cela prend en moyenne 6 mois pour tomber enceinte. J’étais particulièrement fière de ce dernier argument. J’avais simplement oublié la définition du mot moyenne.
Un bébé italien
Deux mois après cette discussion, j’ai des doutes. Les odeurs fortes telles que celle de la cigarette me révulsent le coeur. Je me sens nauséeuse, surtout quand je bois un verre de vin à l’occasion. Nous sommes le 9 août 2018, je pars le lendemain pour une semaine en Géorgie et j’ai envie d’en avoir le coeur net. Je vais donc m’acheter un test de grossesse, enfin même deux, histoire de pouvoir faire un double check. Je suis toute seule dans mon appartement parisien, il est environ 14h. Le résultat du premier test est sans appel, je suis enceinte. Merde. Trop cool. Merde putain. Foliiiieeee. Je ne sais pas si je suis heureuse ou juste complètement paniquée. Je ris et je pleure en même temps. J’ai l’air bien ridicule, heureusement qu’il n’y a pas de témoins. C’est une chose d’en parler mais de l’être réellement ça fait vraiment tout drôle. Lucas est au travail jusque 21h, je vais devoir tenir jusque là comment je vais faire ?!
« Ils sont beaux tes six mois de moyenne ! »
Lucas
C’est comme ça que la grande aventure a commencé, bien plus vite que prévu. Je revois Lucas me dire “ils sont beaux tes 6 mois de moyenne” !! Lui est féru de mathématiques alors les moyennes, ça le connaît. Je ne sais même pas comment il a cru en mon argument. Le premier choc passé, cette nouvelle nous a rempli de joie mais un petit détail avait changé depuis notre discussion initiale de juin. On avait décidé entre-temps de repartir vivre à Milan. On avait déjà eu une expérience de quelques mois là-bas avant de revenir à Paris où on pensait s’installer un bon bout de temps. La vie en avait décidé autrement. Voilà que j’étais enceinte et que le mois suivant on devait s’installer en Italie.
Comme si ça ne suffisait pas, Lucas me fait sa fameuse demande en mariage à la fin du même mois d’août. Voilà. On a donc profité des aurevoirs à nos familles et à nos amis pour leur annoncer la double nouvelle. Ils ne s’en sont pas encore remis #sorrynotsorry, la vita è cosi* comme disent les italiens !
Premiers pas en Italie
Les aléas dus à notre calendrier professionnel ont fait qu’il était prévu que je parte d’abord seule à Milan car mon contrat local commençait plus tôt que celui de Lucas. J’avais réussi à obtenir de mon entreprise en France de me transférer au siège de Milan. Lucas devait me rejoindre deux semaines plus tard. Ces deux semaines seule et enceinte dans notre nouveau pays d’accueil m’ont laissé un souvenir doux amer. Douceur et excitation de commencer cette nouvelle vie en Italie, amertume de le faire seule, pour l’instant.
« Vivre une grossesse en Italie, c’est une affaire particulièrement sérieuse. »
C’est pendant ces deux semaines que j’ai réalisé que vivre une grossesse en Italie c’est une affaire particulièrement sérieuse. Et que mes galères avec l’administration italienne ont commencé. Toute excitée de ma grande nouvelle, je n’avais pas de médecin/gynécologue attitré à Paris. Je m’étais dit qu’une fois sur place je n’aurais aucun mal à trouver un médecin pour effectuer mon suivi. Que nenni ! Je me suis rapidement rendue compte que le système administratif italien était une vaste toile d’araignée. Comme celle de l’araignée géante du Seigneur des Anneaux avec sa toile gigantesque, gluante et toxique. Et je suis à peine dans l’abus !
Les Mamme italiane
J’en arrive au constat qu’il y a deux sortes de femmes en Italie. D’un côté, les italiennes grande classe, les milanese par excellence. Pour elles, ne serait-ce que mettre le pied dans un établissement public de santé est inenvisageable. De l’autre, le commun des mortels, les immigrés dont je fais partie. Jeune française convaincue par l’Etat Providence dont on nous rabâche les oreilles depuis l’après-guerre. Non que je veuille défendre une quelconque opinion politique à travers ce blog. Mais ne pas payer 300 euros par consultation, quand on pense au nombre de consultations obligatoires pour une grossesse physiologique, ce n’est pas de la politique, c’est de la survie !

Tout est pourtant plus simple quand on se fait suivre “dans le privé” en Italie. On a le luxe du client car en échange d’une coquette somme, on peut choisir son praticien, ses lieux et ses heures de rendez-vous. On peut même communiquer avec lui via whatsapp et faire presque autant d’échographies qu’on le souhaite ! Cette solution de facilité était impossible pour moi. Déjà pour le principe de payer autant alors que les médecins des établissements publics sont tout aussi compétents. Ensuite tout simplement parce qu’on en avait pas la possibilité financière.
Trouver son medico di base
Je comprends après déjà quelques jours de flottement que tout commence par le médecin traitant, le medico di base. En Italie, on vous attribue un médecin traitant et on ne peut être reçu que par lui et uniquement sur rendez-vous. Je réussis à m’en dégoter un, qui parle français de surcroît, après avoir passé plusieurs pauses déjeuner à faire la queue, mon ticket numéroté à la main, à l’institut de santé public italien (l’INPS, l’équivalent de notre Sécurité Sociale). Ahhhh les italiens et leur amour pour les tickets numérotés… gare à celui qui se tromperait de guichet ou de demande, il ne trouvera personne pour le renseigner ! C’est là que réside toute la difficulté du système. Il est complètement partimenté et pour chaque démarche, voire pour chaque étape de chaque démarche, une seule personne est compétente et tout le dossier est à re fournir avec, souvent, des documents en plus/ en moins/ différents. Une galère sans nom… C’est là que je me rends compte qu’en France on est quand même très très bien lotis.
Passés ces premiers stades de prise de conscience face à la montagne qui s’élève devant moi, je décide de me tourner vers…les Italiens. Ou plutôt les Italiennes. Qui mieux qu’une personne habituée depuis sa naissance à ce système tentaculaire peut m’aider à clarifier ma situation auprès de l’état italien ? et obtenir enfin une place à l’hôpital le moment venu d’accoucher ?! Smart decision it is. Mes collègues et les RH de mon entreprise viennent à ma rescousse et je finis par m’en sortir. J’ai pu au passage perfectionner mes talents de comédienne dramatique auprès d’un certain nombre de fonctionnaires pour obtenir divers rendez-vous, ordonnances et autres échographies. « Ma come faccio io? E il mio primo bimbo, sono francese, appena arrivata in Italia, non ho nessun posto dove partorire! Per favore, aiutatemi!« *
La déesse Mère
Tout le monde connaît le cliché de la mamma italienne qui fournit la vie – et surtout la sauce tomate !
Les fonctionnaires italiens, comme tous les italiens en général, sont particulièrement attendris par la Femme Enceinte. Je mets des majuscules là car c’est presque une appellation réservée à une déesse. En Italie la maternité c’est sacré. Tout le monde connaît le cliché de la mamma italienne qui fournit la vie – et surtout la sauce tomate ! Et bien cela commence dès la grossesse. Dans la rue et les lieux publics, les gens s’écartent et vous cèdent leur place. Ils vous congratulent, vous posent des questions sur le sexe du bébé et la date prévue d’accouchement. Ils vous demandent même son prénom (le choix du prénom en Italie c’est une affaire de famille sérieuse) ! Et les vieilles dames que vous croisez vous lancent des “Auguri!”*. La première fois que ça m’est arrivé j’ai mis un certain temps à comprendre que la petite dame me félicitait tout simplement d’être enceinte !
« En Italie, avoir un enfant cela veut dire tout lui donner. »
Le taux de natalité est en effet un vrai sujet chez les italiens qui vivent une véritable “crise des berceaux” depuis quelques années. Les seuls à maintenir à flot ce taux sont les immigrés. En effet, les italiens prennent la maternité tellement au sérieux qu’ils ne font tout simplement plus d’enfants. Ils adoptent des chiens à la place, c’est moins cher (et moins chiant). Je n’ai jamais vu autant de chiens au mètre carré qu’à Milan.
En Italie, avoir un enfant cela veut dire tout lui donner, de l’allaitement quasi obligatoire, à assurer ses études supérieures et jusqu’à payer sa première maison lorsqu’il se met en ménage. Alors forcément, avant de sauter le pas, on y réfléchit à deux fois. Cela a également pour conséquence que les mères italiennes ont en moyenne leur premier enfant très tard (vers 35/40 ans). À tel point que l’obstétricien m’a demandé si ma grossesse était voulue. J’étais trop jeune selon lui pour décider en toute conscience d’avoir un enfant à 29 ans.
Des mères choyées
L’avantage est que les quelques femmes qui portent la vie sont traitées comme des reines par le reste de la société. Au bureau, dès qu’il y a à manger (et tous les jours un collègue différent ramène quelque chose à manger, souvent en relation avec sa région d’origine), c’est toujours la femme enceinte qui en bénéficie en premier. Les places assises dans tous les transports lui sont automatiquement attribuées, elle a la precedenza, la priorité pour tout. Cela m’a bien servi à 8 mois et demi de grossesse, pendant le Salon du Design à Milan où j’ai laaaaarrrrgement profité de cet avantage pour éviter les queues de 2h30 pour voir l’expo dont tout le monde parle !
Il est attendu des mères italiennes qu’elles se mettent au repos dès les premières semaines de grossesse. Les gens seront toujours étonnés de vous voir faire quoique ce soit d’autre que vous reposer. Ce n’est bien évidemment pas ma vision de la grossesse et lorsque j’ai demandé à travailler jusqu’à la fin de mon huitième mois, mes collègues ont trouvé ça très bizarre. En Italie le congé maternité est de cinq mois, deux mois avant et trois mois après l’accouchement. Il était hors de question pour moi de rester deux mois seule chez moi à attendre que mon fils veuille bien naître. Du coup j’ai demandé une dérogation et j’ai pu travailler jusqu’à un mois avant l’accouchement.
« S’ils pouvaient juste arriver dans le bec d’une cigogne ou dans les choux cela m’arrangerait merci bien ! »
Fin de grossesse apaisée
La grossesse n’est pas à proprement parler une période que j’ai aimé dans le sens où voir mon corps changer a été compliqué. J’ai toujours voulu avoir des enfants mais pas spécialement être enceinte. S’ils pouvaient juste arriver dans le bec d’une cigogne ou dans les choux cela m’arrangerait merci bien ! J’ai eu beau me raisonner en me disant que mon corps est incroyable pour ce qu’il arrive à faire, j’avais hâte que ça se termine ! J’ai pourtant essayer de profiter au maximum de cette nouvelle vie en Italie et d’adopter des habitudes qui m’ont fait du bien. Je vous en parle dans mon article sur comment bien vivre sa grossesse.
Le dernier mois je me suis enfin arrêtée de travailler et j’ai eu énormément de visite. Mes soeurs sont venues à tour de rôle, puis ma mère qui était là pour l’accouchement. Je me suis sentie entourée et je pense que c’est ce qui m’a permis d’arriver plus ou moins sereinement à l’accouchement. Le Salon du Design de Milan tombait pile la semaine avant mon accouchement (début avril 2019). J’en ai bien profité ce qui m’a permise de rester active et de ne pas trop penser à ce qui m’attendait à l’hôpital.
J’ai vécu une grossesse riche en rebondissements et en choc des cultures. Mais vivre en Italie en étant enceinte a quand même de sacrés avantages comme pouvoir goûter toutes les pizzas et les pastas à la ronde sans (trop) se soucier des calories. J’en ai profité pour tester plein de bonnes adresses et m’installer dans cette nouvelle vie et ce nouveau pays. En tout cas, avoir été enceinte en Italie, c’est une expérience dont je me souviendrais toute ma vie !
Et toi, comment et où as-tu vécu ta grossesse ? Est-ce que tu en gardes des bons souvenirs ? Partage moi ton expérience en commentaire !
*la vita è cosi : c’est la vie !
* Ma come faccio io? E il mio primo bimbo, sono francese, appena arrivata in Italia, non ho nessun posto dove partorire! Per favore, aiutatemi! : Mais comment je fais moi ? C’est mon premier enfant, je suis française, je viens d’arriver en Italie, je n’ai nulle part où accoucher ! S’il-vous-plaît, aidez-moi !
Tu as été super courageuse “tesoro” 🙂
Je n’ai pas eu ton courage, je suis rentrée à Lyon 3 mois avant le terme pour accoucher en France !
Merci ma bella mais je te comprends j’ai longuement hésité et puis on s’est arrangés pour que ma mère soit là pour le terme du coup ça m’a rassurée 🙂
I loved your article and I cam completely relate, having a baby myself in France. I was so lucky to have you around for that but being pregnant is such a unique experience that only the person having the child understands the feeling. You put it in such good words that it was easy to understand and relate to your feelings. Looking forward to reading more.
That is sooooo sweet ! Having a baby abroad far from our families is really hard but you can be proud you did it and he is so well now. You were brave every step of the way. Keep going like this <3
Joli article ! Effectivement la grossesse est déjà une période perturbante alors la vivre loin de sa famille et dans un pays étranger ça n’a pas du être facile .
Surtout qu’on est d accord on est pas au top pendant 9 longs mois….
xxx
Hé oui… on est pourtant bien obligées de passer par là, du coup les pizzas ça aide aussi à ça ;))
Hello! Oh quelle joie de tomber sur cet article qui me rassure beaucoup!!
J’ai rejoins mon mari en septembre près de Milan dans la ville de Roméo et Juliette ! Et je viens d’apprendre que serais quelque peu encombrée pour les 9 prochains mois 😂 je suis un peu stressée à l’idée d’accoucher ici ! Je ne suis pas spécialement proche de ma famille donc ce n’est pas ce qui me dérange. je ne connais pas de locaux encore. Est il possible d’echanger sur l’administratif lié à la maternité svp? Je suis un petit peu perdue ! Merci beaucoup ✨ et vraiment… Top top cet article ! Je suis déjà en train de parcour ce blog! Merci !
Hello ! Contente que cet article ait pu te rassurer 😉 Tu peux me contacter via DM sur Instagram @calixiss j’essayerais de répondre à tes questions. En tout cas j’ai adoré Vérone c’est une ville magnifique !